Le févier d'Amérique
Gleditsia triacanthos se distingue par la faiblesse de son cortège d'agents parasitaires et par ses grandes capacités d'adaptation, aussi ingrat ou asséchant soit le terrain... Un atout indéniable pour cet arbre d'ornement !
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PORTRAIT DE L'ARBRE
Gleditsia triacanthos est un bel arbre de grande dimension – pouvant atteindre 30 à 35 m de haut – doté d'un houppier évasé et d'une frondaison souple. Ses feuilles composées de petites folioles procurent une ombre légère et permettent aux graminées et aux plantes de se développer dessous sans être contrariées. Son tronc et ses charpentières portent de grandes épines rigides de 5 à 15 cm de long souvent groupées par trois ; elles constituent un véritable danger pour celui qui s'aventure dans le houppier. Des inclusions d'écorces peuvent apparaître au niveau d'enfourchements d'origine traumatique qui doivent être systématiquement corrigés lors des tailles de formation. Les fruits du févier en forme de gousses allongées et aplaties mesurent 30 cm de long en moyenne ; ils sont coriaces, souvent vrillés et, une fois secs et bruns, persistent longtemps sur l'arbre. Les graines non toxiques peuvent être torréfiées et remplacer le café. L'écorce mince et lisse se craquelle sur des axes âgés. La croissance du févier est rapide, et son bois dur et compact revêt une couleur rougeâtre. Son enracinement est réputé profond, mais attention cependant aux risques de drageonnement dans des sols superficiels.
Originaire du continent nord-américain, cet arbre pousse naturellement aux États-Unis, dans les régions centrales et orientales, et se rencontre au nord jusqu'au Canada. Il a été introduit au début du XVIIIe siècle en Angleterre dans le jardin de Fulham. Son nom de genre provient de celui d'un botaniste allemand, J.-G. Gleditsch (1714-1786), directeur du Jardin botanique de Berlin et ami du célèbre Carl Von Linné. Son nom d'espèce, « triacanthos », fait référence aux puissantes aiguilles groupées par trois dont il est doté. On l'appelle communément « févier d'Amérique » ou « févier à trois épines » et, plus rarement, « carouge à miel » ou « épine du Christ ». Il est parfois nommé à tort « caroubier » en raison de certaines ressemblances avec cette essence (Ceratonia siliqua) méditerranéenne de petite taille aux folioles larges qui ne vit que dans des terres acides (Catalogne, massif de l'Esterel...). Enfin, en Languedoc, le févier d'Amérique était autrefois appelé « arbre de las cagaraulas », l'arbre aux escargots, car ses grandes épines permettaient d'extraire les gastéropodes de leurs coquilles ; elles étaient conservées dans les familles languedociennes et gravées au nom de leur utilisateur.
Autrefois, le Gleditsia triacanthos taillé régulièrement permettait de constituer des haies défensives. Aujourd'hui, il est utilisé comme arbre d'ornement isolé ou il fait partie d'alignements urbains lorsque l'espace aérien disponible est suffisant. Il est naturalisé dans de nombreuses régions et, parmi toutes les variétés disponibles, celle que l'on choisit prioritairement est 'inermis' dont le tronc ne porte pas d'épines. La variété inerme 'Sunburst' présente un feuillage doré au printemps.
SENSIBILITÉS ENVIRONNEMENTALES
Le févier d'Amérique peut résister facilement à des températures inférieures à - 25 °C. Il exige des emplacements très lumineux et il lui est difficile de se développer sous un ombrage. Il est capable de supporter de fortes températures, notamment celles portées par le rayonnement solaire lorsqu'il atteint l'écorce du tronc. Le févier appartient ainsi au groupe d'arbres les plus résistants aux phénomènes « d'échaudure corticale » rencontrés sur les jeunes plantations. Les épisodes de sécheresse et de canicule estivales le contrarient également très peu. Côté sol, il n'apprécie guère l'humidité et l'engorgement d'eau, et ne supporte que des hydromorphies de courte durée et hivernales. Une terre sèche et légère lui convient, et la présence de calcaire lui est tolérable. Le févier est réputé assez sensible aux « coups de vent » responsable de bris de branches. Il peine à recouvrir les grosses plaies qui lui sont infligées, tout particulièrement lors de sévères élagages. Il tolère relativement bien les pollutions urbaines et notamment la présence de reliquats de sels de déneigement dans les sols. C'est vraiment une essence dotée de qualités multiples pour satisfaire aux exigences du milieu urbain !
GRANDES AFFECTIONS PARASITAIRES
Peu de problèmes parasitaires touchent le févier d'Amérique en Europe et leur incidence sur sa santé reste à ce jour tout à fait mineure. En revanche, dans son aire géographique d'origine, l'essence est confrontée à un cortège d'agents parasitaires beaucoup plus étoffé, notamment des affections chancreuses occasionnées par des mycètes parasites se développant sur le tronc et le collet de l'arbre et qui peuvent entraîner son dépérissement (Thryonectria austroamericana et Tubercularia ulmea).
Affections foliaires
La cécidomyie du févier (Dasineura gleditschiae) s'invite dès le printemps sur les jeunes feuilles en croissance. Les diptères adultes pondent leurs oeufs sur les jeunes folioles à la mi-mai ; les asticots sortants provoquent alors une déformation caractéristique en gousse des folioles infestées. Vert jaunâtre dans un premier temps, elles rougissent ensuite puis se dessèchent. Les larves matures tombent au sol et se nymphosent. Pendant l'été, se succèdent plusieurs générations de mouches qui infestent systématiquement les jeunes feuilles au cours de leur apparition. L'insecte hiverne dans le sol. Les pousses se déforment fortement mais l'arbre n'est pas affecté de façon significative. Sur des sujets très touchés, la « chute » régulière des petits asticots de la cécidomyie peut entraîner des nuisances pour l'homme.
Parasites et ravageurs des rameaux et des branches
Quelques espèces de cochenilles s'aventurent parfois sur les rameaux des féviers d'Amérique. La cochenille du cornouiller (Parthenolecanium corni) forme des coques brunes d'aspect brillant sur les rameaux et les branches de faible diamètre. Sa présence reste toujours très discrète et ne perturbe guère les arbres. Plus dommageables peuvent être les attaques d'une cochenille diaspine, le pou de San José (Quadraspidiotus perniciosus). D'origine asiatique, cette cochenille très polyphage s'installe parfois sur de jeunes sujets. Des encroutements de petits boucliers (2 mm) de couleur grise, ronds et légèrement convexes, sont alors visibles sur les écorces. Il est possible que les branches colonisées dont les feuilles jaunissent prématurément finissent par s'affaiblir. Sur des axes blessés, dominés et dépérissants, un champignon opportuniste, le Nectria cinnabarina prend souvent place et signe sa présence par l'apparition de pustules orangées à rougeâtres. Cette affection qualifiée de maladie du corail n'endommage pas l'arbre, elle ne touche que les parties affaiblies. Une taille sanitaire permet d'éliminer ce champignon.
Pathologies racinaires
Comme de nombreux ligneux, le févier d'Amérique n'est pas épargné par le pourridié racinaire occasionné par l'armillaire couleur de miel (Armillaria mellea). Ce redoutable champignon qui se comporte parfois en parasite primaire peut entraîner le dépérissement et la mort brutale d'un arbre adulte. Des fructifications en touffes denses apparaissent souvent au niveau du collet et des palmettes mycéliennes sous-corticales se multiplient sur les racines.
Champignons lignivores
Sur la partie aérienne du févier, plusieurs espèces se développent à partir de plaies et blessures accidentelles. L'agent lignivore le plus fréquent, le polypore soufré (Laetiporus sulfureus), est responsable d'une pourriture rouge cubique du bois particulièrement cassante. Les volumineuses fructifications colorées du champignon s'observent de la fin de l'été à l'automne. Sur les mâts racinaires de l'arbre, le ganoderme européen (Ganoderma adspersum) et l'haplopore du frêne (Perenniporia fraxinea) provoquent une pourriture blanche fibreuse pouvant remonter dans la base des troncs. Cette dernière espèce paraît moins virulente et semble progresser plus lentement sur le févier.
Pierre Aversenq
Galles en « gousse » sur les jeunes folioles occasionnées par Dasineura gleditschiae.
Coques brunes et luisantes des femelles adultes de la cochenille du cornouiller (Parthenolecanium corni).
Enfourchement à écorce incluse marqué ayant pour origine une fourche traumatique.
Pustules orangées de Nectria cinnabarina sur les écorces d'une branche dépérissante affectée par la maladie du corail.
Fructifications de l'armillaire couleur de miel (Armillaria mellea).
Importante cavité développée à partir d'un ancien arrachement.
Plaques mycéliennes sous-corticales de l'armillaire visibles sur le tronc juste au-dessus du collet de l'arbre.
Jeunes fructifications du polypore soufré à l'automne, sur le tronc d'un févier endommagé.
Console vivace du ganoderme européen apparue au collet, entre deux massifs contreforts racinaires.
Fructification en pleine croissance de l'haplopore du frêne (Perenniporia fraxinea).
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